Questions au ministre des transports, mon intervention en séance le 28 février
Monsieur le président, monsieur le Ministre, mes chers collègues,
Mon temps étant compté je souhaiterais limiter mon propos à deux questions d’actualité qui touchent très directement à nos investissements futurs en matière d’infrastructures de transports.
Ma première interrogation est née de la lecture, ce matin même, de votre entretien publié dans le journal Les Echos. On y apprend que la fiabilité du dispositif technique d’émetteurs destiné à la collecte de l’éco-taxe poids lourds doit encore être sécurisée. Vous en tirez les conséquences en abandonnant d’une part l’expérimentation préalable en Alsace prévue initialement en avril, et d’autre part, en renvoyant la mise en œuvre de l’éco-taxe au 1er octobre…
Il s’agit là d’un nouvel épisode d’une histoire qui s’écrit à coup d’atermoiements, d’ajournements successifs et de délais supplémentaires.
Je rappelle qu’aux termes de l’article 11 de la loi de 2009, dite Grenelle 1, l’éco-taxe devait être prélevée sur les poids lourds à compter de 2011. Nous parlons désormais d’octobre 2013, soit un retard de près de trois années.
Ce nouveau retard, qui ne vous est évidemment pas imputable, est une mauvaise nouvelle pour celles et ceux qui, plaidant pour une fiscalité écologique, attendent de cette taxe un report modal et la décongestion des axes routiers.
Ce retard sera aussi un préjudice pour le financement des infrastructures de transport. En effet, chacun le sait ici, cette taxe a également pour objet le financement de l’AFITF. Lors du débat budgétaire de cet automne, je m’étais félicité de l’entrée en vigueur d’une taxe qui autorise un financement pérenne de l’Agence et ouvre la voie à la mise en œuvre d’un SNIT dont vous avez souhaité réorganiser les priorités, avant il était jusqu’ici la simple addition de promesses. Ce préjudice vous l’évaluez à 80 millions d’euros par mois, estimation qui semble être la fourchette basse pour une taxe qui doit rapporter 1,2 milliards en année pleine.
Vous dites dans votre entretien que vous appliquerez les dispositions contractuelles prévues avec le prestataire en cas de retard dans la livraison finale. Très bien. Mais personne n’imagine que ces pénalités pourront compenser en quoi que ce soit le préjudice subi. La question du financement de l’AFITF est donc posée pour 2013.
Sur le dernier trimestre, quelle part de l’éco-taxe prévoyez-vous de transférer à l’Agence de Financement des Infrastructures de Transport de France et quelle part rétrocèderez-vous aux collectivités territoriales?
Comment envisagez-vous de compenser les pertes de recettes pour l’AFITF?
Depuis 2008, l’Etat accorde chaque année une subvention d’équilibre à l’Agence. En 2012 elle était de 1123 millions d’euros. Qu’anticipez-vous au titre de l’année 2013?
Ma seconde interrogation porte sur une question que certains pourraient considérer comme locale, mais que ceux qui se sont penchés sur la question savent d’intérêt national : je veux évidemment parler de la situation particulière des réseaux de transports franciliens.
Dans quelques jours le gouvernement rendra ses arbitrages notamment sur le métro automatique. Ce projet attire l’attention de tous à juste titre.
Mais je souhaite dire ici qu’il n’y a pas que le « grand Paris Express » dans la vie. Il y a aussi une vie après la première couronne.
Et dans cette vie-là, il y a des femmes et des hommes dont la durée de transport ne décroit pas mais augmente.
Dans l’état actuel du réseau, rien ou presque n’est possible pour les populations.
Pour répondre à cette urgence, la Région et ses partenaires ont lancé en 2008 un Plan de mobilisation de plus de 18 milliards d’euros afin de moderniser l’ensemble du réseau de transport francilien. L’objectif affiché est de répondre, d’ici à 2020, aux besoins présents et futurs des Franciliens.
Le problème des plans ou des schémas, c’est qu’ils ne relèvent que des bonnes intentions, celles dont on pave l’enfer, tant que leur financement n’est pas entièrement assuré.
Je connais votre inclination personnelle pour que la priorité soit donnée aux transports du quotidien, et je souhaite donc réaffirmer devant vous ce soir la nécessité de donner la priorité à ce plan de mobilisation, c’est-à-dire assurer son financement sans en retarder l’échéance.
Il serait incompréhensible pour nos concitoyens de voir déshabiller Paul pour habiller Pierre, ou encore de voir un métro automatique dépasser des RER…
S’agissant des LGV, chacun sait ce qu’elles peuvent apporter aux métropoles et aux régions non desservies. Mais chacun doit aussi saisir qu’un minimum de phasage est nécessaire et qu’il importe dans l’intérêt de tous de veiller préalablement à la désaturation de la région capitale.
De ce strict point de vue il me semble indispensable, s’agissant de la grande vitesse, de prioriser les projets de contournement de la capitale, ce qui me permet de plaider une fois encore devant vous la nécessité de mettre enfin en oeuvre le projet d’interconnexion sud. C’est tout à la fois de nature à décongestionner les sillons utilisés par les RER, un gain de temps pour les usagers qui n’auront plus à descendre gare de Lyon pour traverser Paris en direction d’une autre gare, et un levier pour le développement économique du sud francilien, raison pour laquelle la région Ile de France a d’ores et déjà marqué sa disponibilité pour un co-financement.
Voilà, j’achève mon propos en soulignant me semble-t-il un projet qui correspond à ce que vous avez dans votre discours liminaire qualifié de « petites opérations » qui peuvent avoir de grands effets.
Voilà, monsieur le Ministre, vous êtes le ministre du quotidien comme vous avez justement pris plaisir à le rappeler tout à l’heure. Voilà pourquoi les réponses que vous aurez à formuler sont particulièrement attendues, au-delà de cet hémicycle par tous les citoyens.