Budget transport 2015
Olivier Faure, rapporteur spécial du budget relatif aux infrastructures de transports collectifs et ferroviaires a présenté ce matin les grandes orientations pour la loi de finances 2015. Il a notamment interpellé le secrétaire d’Etat sur les substitutions envisagées à l’écotaxe poids lourds et sur les relations entre l’Etat et les sociétés d’autoroutes.
06/11/2014 Budget transports 2015 par olivierfaure
Madame la Ministre,
Monsieur le Secrétaire d’État,
Messieurs les Présidents,
Mes chers collègues,
En tant que Rapporteur spécial de l’action 10 du programme 203, je suis chargé de rapporter les crédits relatifs aux infrastructures de transports collectifs et ferroviaires.
Cette action est le « poids lourds » du programme, puisqu’avec 2,48 milliards d’euros, elle concentre à elle seule 77 % des crédits du programme et près d’un tiers des crédits de la mission Écologie, développement et mobilité durables. Or, ces crédits sont en diminution de près de 15 % pour l’année 2015, tirant, de ce fait l’ensemble des crédits du programme 203 à la baisse.
Je rejoindrai ici le constat dressé par mon collègue Alain Rodet : si cette baisse semblait une perspective réjouissante dans ce contexte budgétaire car elle signait là la baisse de la subvention d’équilibre apportée par l’Etat, et donc l’autonomie financière de l’AFITF, l’enterrement des péages de transit est venue ternir quelque peu ce tableau.
En effet, traditionnellement, les crédits de l’action 10 sont répartis entre la subvention versée à RFF -90 % des crédits- et la subvention d’équilibre versée à l’AFITF dans l’attente de ressources nouvelles dont nous avons longtemps espéré qu’elles proviendraient de l’écotaxe poids lourds. Pour des raisons d’opportunité liées au contexte, le gouvernement y a renoncé pour leur préférer des péages de transit. Ces péages ont depuis eux-mêmes été suspendus sine die.
Ce qui devait être payé par les chargeurs, notamment étrangers, qui utilisent nos infrastructures sans les financer, le sera in fine par les automobilistes et les entreprises de transport par le biais d’une augmentation de 2 centimes d’euros du tarif de la taxe intérieure sur les produits énergétiques (TICPE) sur le gazole. La part de la TICPE revenant à l’Agence s’élèvera, pour l’année 2015, à 807 millions d’euros.
Voilà pour la bonne nouvelle. Côté incertitude, la résiliation annoncée du contrat avec la société Ecomouv’ bouleverse quelque peu ces perspectives et ne peut que susciter des interrogations concernant le financement des engagements à venir mais également passés de l’AFITF. En effet, la Cour des comptes dans le rapport qu’elle vient de publier sur la Grande vitesse, indique clairement que l’Agence se trouve dans l’impossibilité d’honorer convenablement ses engagements budgétaires actuels mais, faute d’une ressource nouvelle et pérenne, elle n’a plus de marge de manœuvre pour des dépenses nouvelles jusqu’à l’horizon 2030. La Cour considère que l’affectation en 2015 de recettes issues de l’augmentation de la TICPE sur le gazole ne permettra probablement pas de combler le manque à gagner lié à la suspension de l’écotaxe. Je vous poserai ici ma première question, Monsieur le Secrétaire d’État : pourriez-vous nous indiquer précisément le montant du manque à gagner pour l’Agence en 2015 du fait de l’enterrement définitif des péages de transit ? A quel montant s’élèveront les coûts de rupture du contrat avec Ecomouv ?
Par ailleurs, j’aimerais savoir si vous avez prévu d’allouer à l’Agence une subvention d’équilibre pour pallier cette perte pour 2015 ?
Des pistes de financement sont recherchées du côté des sociétés concessionnaires d’autoroutes (SCA). En effet, je partage également l’opinion de mon collègue Alain Rodet, la rentabilité exceptionnelle des SCA ainsi que les avantages fiscaux dont elles peuvent bénéficier doivent nous conduire à réfléchir sur les moyens de faire participer davantage ces sociétés au financement des infrastructures de transport. Il convient toutefois de ne pas percuter la mise en œuvre du plan de relance autoroutier, qui, je le rappelle représente un investissement de 3,2 milliards d’euros de la part des SCA en contrepartie d’un allongement des contrats compris entre deux et six ans et permettrait la création de 15 000 emplois. Ce plan a reçu l’aval de Bruxelles pour 26 opérations. J’en viens ainsi aux questions suivantes : quelles sont les opérations qui n’ont pas été validées par la Commission et pour quelles raisons ? Est-il possible d’amender et de rééquilibrer par ce biais les rapports SCA/Etat ? Existe- t-il une marge de manœuvre pour trouver des financements supplémentaires pour l’AFITF dans le cadre de sa mise en œuvre ? Enfin, pouvez-vous nous donner quelques éléments sur la nature des discussions engagées ?
Par ailleurs, je crois comprendre que le projet de loi pour l’activité prévoit la création d’une autorité indépendante chargée de contrôler les contrats passés entre l’État et les sociétés concessionnaires d’autoroutes. S’agit-il d’étendre les pouvoirs de l’actuelle Autorité de régulation des activités ferroviaires ou de créer une nouvelle autorité ?
Concernant plus précisément les transports ferroviaires, bien avant le constat de la Cour des comptes, j’en partageais déjà les conclusions : la politique du « Tout TGV » conduite trop longtemps et poussé à son apogée lors de la précédente législature s’est révélée être une erreur stratégique sur le plan financier et une aberration sur l’allocation des moyens publics limités qui auraient dû être prioritairement affectés aux transports du quotidien. Et c’est la raison pour laquelle je salue l’effort consacré à la régénération et à la modernisation du réseau ferroviaire dans le projet de loi de finances pour 2015. En effet, la subvention versée à RFF s’élève à 2 477 millions d’euros et devraient concourir à l’amélioration de la performance du réseau ferroviaire, à son développement mais également à la promotion des transports collectifs. Ainsi, hors Île-de-France, un troisième appel à projets en faveur des transports collectifs en site propre est lancé et en Île-de-France, seront mis en œuvre tant le Grand Paris Express que le plan de mobilisation pour les transports collectifs. Je précise à cet égard que les 140 millions d’euros que le gouvernement s’était engagé à trouver pour compléter l’effort régional a été tenu. Nous l’avons adopté hier soir lors de la discussion des articles rattachés. Il demeure cependant des incertitudes sur la ventilation entre ce qui sera dû par les ménages et ce qui sera payé par les entreprises. Pouvez-vous nous donner des éléments sur cette répartition ?
Enfin, je tiens à rendre hommage à l’action gouvernementale qui a œuvré pour la refonte de la gouvernance ferroviaire, via l’adoption de la réforme ferroviaire. Rappelons qu’avec une dette de 33,7 milliards d’euros supportée par RFF, il existait une impérieuse exigence de rétablir une trajectoire financière soutenable permettant une maîtrise de la dette. Cette réforme devrait améliorer la trajectoire financière du système de l’ordre d’un milliard d’euros et le renforcement de la règle d’or devrait permettre de parvenir, à terme, à son équilibre. Dès lors, pourriez-vous, Monsieur le Secrétaire d’État, nous préciser le calendrier de la mise en œuvre de la réforme ? Et ce sera ma dernière question : si la question du déficit structurel a été réglée par la réforme, demeure celle du stock de dette. La réflexion du gouvernement a-t-elle avancé en la matière ?
Je vous remercie.