Les déclarations hallucinantes de MAM sur la situation en Tunisie
La scène est passée inaperçue. Les interventions du Premier Ministre sur les deux jeunes otages assassinés ont monopolisé l’attention médiatique lors de la séance des questions d’actualité du 11 janvier.
Elle mérite pourtant d’être racontée, tant elle révèle la pensée scandaleuse de la ministre des Affaires étrangères.
La situation en Tunisie est préoccupante. Des dizaines de jeunes gens, étudiants pour la plupart, ont payé de leur vie l’absence de droit à manifester. La presse étrangère ne peut plus travailler librement. Jean-Paul Lecoq (PCF) interroge donc MAM sur un gouvernement « si prompt à s’exprimer sur la situation démocratique en Côte d’Ivoire » et le silence assourdissant sur la répression policière voulue par le président Ben Ali. Le parallèle est certes un peu rapide, mais la question de la position de la France est bien posée.
Michèle Alliot-Marie se lève, et avec son habituel ton pincé ose une réponse tout simplement hallucinante. Elle commence par reprocher à son interlocuteur de « lancer des anathèmes » alors qu’il s’est limité à rappeler un principe universel, celui des droits de l’Homme dont la France s’honore d’être l’auteure. Surtout elle opère une belle sortie de route lorsqu’elle déclare que « le problème des décès et des violences constatées au cours de ces manifestations (…/…) montre le bien-fondé de la politique que nous voulons mener quand nous proposons que le savoir-faire de nos forces de sécurité, qui est reconnu dans le monde entier, permette de régler des situations sécuritaires de ce type »
Personne ne s’attendait à une condamnation explicite du régime autoritaire de Ben Ali. Chacun connaît la ligne diplomatique qui a prévalu jusqu’ici « mieux vaut Ben Ali que Ben Laden ». De là à passer sous silence la responsabilité du pouvoir et à offrir comme seule réponse le savoir faire de nos forces de sécurité…
L’observateur bienveillant pourrait plaider le dérapage verbal, la fatigue ou l’inattention… Las, Axel Poniatowski (UMP) offre une deuxième chance à la ministre en lui posant une nouvelle question sur la Tunisie. Sa question est plus que bienveillante, le président de la commission des Affaires étrangères ayant déjà exprimé publiquement sa volonté que la France ne s’érige pas en « donneuse de leçons ». Il dit son souhait que la France « exprime ses préoccupations avec mesure ». Et là stupeur, ce n’est pas de mesure dont fait preuve Michèle Alliot-Marie mais d’une complaisance coupable : « Aujourd’hui face à cette situation, la priorité doit aller à l’apaisement après des affrontements qui ont fait des morts, un apaisement qui peut reposer sur des techniques de maintien de l’ordre. J’ai fait part tout à l’heure de notre proposition, puisque nous avons des savoir-faire en la matière. De la même façon, il est évident que doivent être prises en compte les réponses apportées par les gouvernements eux-mêmes ».
Si Rama Yade existe encore, si son poste à l’UNESCO n’a pas acheté son silence, on aimerait entendre le son d’une voix à l’UMP qui ne se confonde pas avec de tels propos et nous épargne ce sentiment de honte qui nous envahit.