Chris WARE de retour avec ACME
Attention chef d’œuvre !
D’abord, sur le plan graphique, le travail de Chris WARE ne ressemble à aucun autre. Il mélange les genres avec bonheur, réutilise les standards américains, emprunte à l’univers visuel des comics pour mieux les détourner, copie les pages des magazines des sixties, parodie les pages de réclames…
Mieux que personne, WARE joue avec le temps. L’infiniment court (une feuille qui tombe), l’infiniment long (longs flash back historiques) Ce travail est reconnu depuis longtemps, « Jimmy Corrigan, the smartest kid on earth » a reçu les prix les plus prestigieux (Alph Art à Angoulême 2003, Premier prix du livre du Guardian 2001…), mais l’exploit mérite d’être signalé quand il est réédité avec autant de brio. Cette fois c’est sous le titre ésotérique d’ACME, (recueil de nouvelles publiées par un hebdomadaire de Chicago) que revient WARE.
La compagnie ACME est une entreprise imaginaire inventée par le personnel de la Warner Bros et apparue dans ses premiers dessins animés en 1933. Personne ne connaît son activité exacte, mais son acronyme « American Company Making Everything » (Compagnie Américaine Fabriquant Tout) laisse ouverts tous les horizons (notamment la fabrication des produits les plus futiles, superflus et baroques. C’est ce nom d’ACME que WARE a repris pour fonder sa propre ACME novelty library, label sous lequel il raconte la vie de personnages qui naviguent entre onirisme et néoréalisme, cruauté et absurdité.
ACME se lit comme autrefois le journal de Tintin. Un bottin dans lequel se croisent les feuilletons dessinés. Mais cette fois sous la ligne claire se cachent d’obscurs desseins. Comme dans Jimmy Corrigan, l’auteur nous balade autour de ses thèmes de prédilection. C’est une Amérique déprimante et dépressive qu’il nous dépeint. Celle d’une société de consommation où les névroses et les frustrations atteignent leur paroxysme. Une société de solitudes.