1500 amendements pour alerter l’opinion

1500 amendements pour alerter l’opinion

ayrault-point-press

1500 amendements et sous amendements viennent d’être déposés pour alerter l’opinion.
La majorité accusera l’opposition d’obstruction. Tant mieux! Le sujet le mérite. Le débat qui commence à l’Assemblée est présenté par Xavier Bertrand comme celui de la transcription d’un accord sur la représentativité syndicale (c’est presque vrai de la 1ere partie), et comme le projet de loi qui permettra d’aller aux salariés de travailler au delà de 35 heures sur la base du volontariat (et là on touche à la manipulation car ce ne sont pas les lois Aubry qui sont visées mais les protections collectives).

Le gouvernement n’improvise pas. Il agit selon un plan ordonné. Jean-Marc Ayrault parle de « thatchérisation«  des rapports sociaux. Comment lui donner tort?

Depuis un an se déroule sous nos yeux un plan à l’orthodoxie toute libérale dont les étapes sont :

1. Etablir une économie dite de ruissellement. Avec le paquet fiscal on arrose le sommet de la pyramide, la base finira bien par recevoir les gouttes.

2. Faire de la concurrence l’alpha et l’omega de sa politique de pouvoir d’achat (exit les conséquences sociales). Avec la loi de modernisation économique on explique aux salariés modestes que leur avenir est dans le hard discount. La question des salaires est oubliée. Deux sociétés se mettent en place parallèlement. Celle des gagnants et celle des perdants ; ceux là occupent les emplois peu qualifiés, peu rémunérés, précaires et ont accès à des produits de consommation correspondant à leur niveau de vie.

3. Détruire le code du travail trop protecteur. C’est l’objectif du projet de loi sur la démocratie sociale et le temps de travail. Une à une les protections des salariés sont en passe d’être abrogées.

L’addition fait froid dans le dos. Rien n’est encore apparent, mais les projets de loi s’accumulent sur le bureau du Parlement. Avant la fin octobre, le gouvernement envisage de faire légiférer sur la limitation du droit de grève dans l’éducation, la définition des offres valables d’emploi (pour la mise en œuvre de la sanction des chômeurs refusant deux propositions), l’ouverture du travail du dimanche et la énième remise en cause des règles régissant la durée du travail.

Sur ce dernier sujet, la droite a révélé sa conception du dialogue social. Alors qu’un accord avait été conclu par l’Etat, la CGT, la CFDT et le patronat sur la représentativité syndicale, le gouvernement a préféré trahir sa signature pour ajouter au projet déposé des dispositions remettant en cause 60 articles du code du travail. Même le MEDEF dénonce un passage en force qui menace la démocratie sociale et crée un climat de défiance.

Xavier Bertrand a été agent d’assurance. Cela se voit. Avec lui, ce ne sont pas les gros caractères qui doivent intriguer mais les mots microscopiques en bas de chaque page…
Il joue sur les mots. Il entend préserver la durée légale à 35 heures, mais il autorise les heures supplémentaires jusqu’à la durée maximale européenne, c’est-à-dire 65 heures hebdomadaires. Il prétend que les heures effectuées seront majorées de 25 % mais ce qu’il tait, c’est l’ouverture aux non-cadres des forfaits jours et heures qui ont pour effet de neutraliser le paiement des majorations et met fin à toute notion de durée collective du travail puisque l’employeur pourra, y compris en l’absence d’accord d’entreprise, gérer cette question en gré à gré par des conventions individuelles. Il affiche le maintien de règles nationales, mais ouvre au niveau des entreprises le champ de la négociation sur le temps de travail. C’est l’ordre public social qui est raboté et le dumping social entre entreprises concurrentes qui est organisé.

Ces remises en cause ont lieu pendant la session extraordinaire du Parlement, c’est-à-dire au moment où les Français ont la tête aux vacances plus qu’aux mobilisations sociales. Rien n’est laissé au hasard. Cette majorité UMP se sait impopulaire, mais elle se soude sur des projets qui lui sont identitaires. Elle joue des divisions de la gauche syndicale et politique pour avancer. Sa force c’est sa détermination. Notre faiblesse c’est de penser que nous pouvons prendre le luxe de nous perdre dans des querelles internes sans fin.