Bandes à part
Qui peut nier qu’il existe un problème de violence croissante, de constitution de bandes, dans un face-à-face de plus en plus tendu entre les jeunes et la police ?
Il faudrait être aveugle pour ne pas voir la multiplication des incidents allant de « simples » incendies de véhicules jusqu’à la mise en place de guet-apens contre les forces de police, voire même contre les pompiers.
Il faut être conseiller spécial de Nicolas Sarkozy pour découvrir le quotidien des banlieues à l’occasion d’une visite impromptue hier à Montfermeil au cours de laquelle son véhicule a été « caillasse » copieusement.
Hier à l’assemblée, dans une certaine indifférence a été adopté la proposition de loi Estrosi sur les bandes. C’était le 15ème texte sur la sécurité en sept ans ! ce qui marque en creux l’échec dramatique de la droite sur ce sujet : les violences physiques non crapuleuses ont augmenté de 46,5% entre 2002 et 2008, et les mineurs mis en cause pour violences de 52,6% entre 2002 et 2007 !
Cette « loi Estrosi » sera au mieux inutile car les comportements qu’elle prétend viser sont déjà constitutifs de délits dans l’état actuel du droit pénal. Elle sera au pire dangereuse car elle crée une responsabilité pénale collective. Elle sera dans tous les cas inefficace car inapplicable ; en effet la preuve de l’intention délictueuse sera très difficile à apporter par les policiers et les magistrats. Elle se trompe de cible car elle s’en prend davantage aux mouvements sociaux qu’aux bandes délinquantes.
Pour combattre les phénomènes de bandes, les députés socialistes proposent une orientation radicalement nouvelle, basée sur les expériences concrètes des élus locaux, et organisée autour de quatre objectifs.
1-Contre les zones de non-droit, nous proposons de rétablir la police de quartier. L’action répressive de la police a pour le moment oublié les banlieues, où la présence quotidienne de la police a été remplacée par des forces d’intervention épisodiques, destinées à contenir les désordres ou intervenir en flagrant délit, avec des formes d’intervention militarisées parfois contreproductives. Les unités territoriales de quartier, déployées à dose homéopathique par le gouvernement, ne sont pas à la hauteur. La véritable police de quartier que nous appelons de nos voeux organiserait à l’échelle territoriale l’indispensable travail de renseignement, de sécurité publique, mais aussi les investigations judiciaires de proximité contre l’économie souterraine.
2-Notre second objectif est d’agir contre l’impunité. C’est au premier acte délictueux que la sanction s’avère la plus dissuasive contre la récidive. Les décisions judiciaires ou éducatives sont actuellement trop longues entre le délit et la punition. Il faut assurer la rapidité des sanctions prononcées par la justice avec des délais butoirs concernant les primodélinquants mineurs ou jeunes majeurs. Nous proposons également la mise en place d’un tuteur référent chargé du suivi de l’exécution de la sanction éducative de bout en bout.
3-Convaincus que le fléau de la délinquance doit être combattu dans ses racines, nous souhaitons agir contre la violence juvénile et développer très en amont une prévention précoce, notamment en luttant contre la déscolarisation des moins de 16 ans. En outre, la cohérence et la réactivité de la chaîne pénale et de la chaîne éducative doivent être renforcées par la mise en place d’un groupe opérationnel au sein des conseils locaux de sécurité coordonnant l’action des différents acteurs de terrain.
4-Enfin, notre dernier objectif est d’agir contre la loi du silence en instaurant de nouvelles protections pour les victimes, comme le droit à un avocat dès le dépôt de plainte pour chaque victime de violence physique.
A la communication, nous préférons l’action. Sur un sujet pareil, nous étions en droit d’espérer que la majorité fasse la démonstration d’une véritable capacité d’ouverture. Mais pour Nicolas Sarkozy l’ouverture s’est toujours limitée à quelques opérations de débauchage.